Mozart – Symphonie concertante K.364

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Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) – Symphonie concertante en mi bémol majeur pour violon et alto k.364 (320 d). Composée vers 1779

Wolfgang-amadeus-mozart_1Encore un chef-d’œuvre de Mozart au menu. On pourrait dire qu’il s’agit d’un concerto dans lequel le rôle de la vedette est partagé entre deux solistes; cela se rapproche du concerto grosso de l’époque baroque mais ici les instruments solistes sont indépendants. Par moment l’alto et le violon sont fondus dans la masse orchestrale comme dans une symphonie. Ce caractère hybride entre concerto et symphonie est bien résumé par le terme de Sinfonia Concertante

Sommaire

  1. Présentation
  2. Vidéo et guide d’écoute
  3. Choix de la meilleure version

1. Présentation

La symphonie concertante date de 1779 et se situe dans la période salzbourgeoise (1775-1780), qui correspond à une assez grande production instrumentale (sonates pour piano, concertos pour violon, symphonies…)

L’œuvre est en mi bémol majeur (trois bémols à la clef), mais la partition d’alto indique deux dièses (ré majeur). Cela signifie que l’alto doit être accordé un demi ton plus haut: en jouant un ré comme indiqué sur la partition, on entend un mib. Le fait d’accorder son instrument de manière inhabituelle est appelé scordatura dans le monde de la musique classique et est beaucoup moins fréquent que dans la musique traditionnelle. Évidemment, de nos jours, on trouve des partitions ou la partie d’alto est en mib pour faciliter l’exécution.

Dans les passages symphoniques (tutti) le violon soliste joue généralement la partie du premier violon, et l’ato soliste celle du premier alto.
Dans les passages concertants (solo) le dialogue entre le violon et l’alto utilise souvent le procédé de l’imitation (le violon énonce un thème qui est repris ensuite par l’alto, puis à nouveau par le violon etc…). On peut aussi avoir la même mélodie aux deux instruments simultanément ou bien une mélodie dont le grave est énoncé par l’alto puis l’aigu par le violon.

Les solistes sont soutenus par un groupe de cordes comprenant deux violons, deux altos, violoncelle et contrebasse. Les instruments à vent se limitent à deux hautbois et deux cor. Ni flûte ni clarinette.

2. Vidéo et guide d’écoute


Nous vous proposons un petit guide qui favorisera une écoute active et permettra de mieux s’extasier devant l’habileté de Mozart à proposer un discours très varié mais harmonieux. Le minutage correspond à celui de la vidéo.
Merci au New England Conservatory Chamber Orchestra pour cette belle version. Les solistes sont Grace Park (violon) et Wenting Kang (alto),

1. Allegro maestoso

TUTTI
Démarrage à à 0’42  en homorythmie (rythme identique pour tous les instruments) avec des valeurs de plus en plus courtes, suivi d’une mélodie descendante en croche. Contraste assez magique et typiquement mozartien. La basse effectue des trémolos (notes répétées). L’opposition entre les violons et les altos est bien marquée.
1’10 Les altos énoncent un thème descendant mais les hautbois le jouent de manière renversée  (montante), et sont imités par les violons.
1’35 Trois  blocs: altos et basse, violon I et violon solo avec un thème martelé  par le cor et le hautbois. Le violon II reprend en diminution les notes de l’alto soliste. Puis à nouveaux les altos contre les violons qui sont cette fois soutenus par les cors alors que la basse s’anime sur un rythme de polonaise.
2′ on retrouve notre thème chantant   mais cette fois-ci le dialogue se fait plutôt entre cors et hautbois
2’10 Mozart nous offre une série de modulations sur un motif  simple mais efficace qui repose sur une trille. Le motif est énoncé chaque fois un peu plus haut. Cette marche d’harmonie est énoncée par les violons, puis renforcée par l’alto II avec un soutient en valeur longue des cors et ensuite des hautbois. La conjugaison de la marche harmonique et du soutient instrumental croissant est très réussie.
2’32 Transition avec un thème martial  au hautbois, le motif avec trille que l’on a déjà entendu à la basse et un motif très syncopé aux violons.
2’40 Thème descendant qui annonce le solo. L’impression de flottement est due aux syncopes ( la dernière note de chaque mesure se prolonge sur la mesure suivante.)
SOLO
3′ C’est magique mais on ne sait pas trop pourquoi. Cette entrée en valeur longue de l’alto et du violon à l’unisson pendant que le hautbois termine son discours doit y être pour quelque chose.
3’12 Le violon prend l’initiative et énonce une variation du thème descendant . On note que les hautbois ponctuent le discours comme dans la partie tutti précédente Nouvel unisson puis bref TUTTI.
3’40 changement de climat. Le violon démarre en mineur et le l’alto nous fait repasser en majeur. Dialogue entre les deux solistes avec des arabesques qui reposent un thème montant très simple. L’alto brille autant que le violon. Les altistes sont vengés
4’40 Apparition du célèbre thème bondissant  au violon, puis dialogue en valeurs diminuées.
5’30 Mélodie ascendante  qui démarre à l’alto et se poursuit au violon puis unisson.
TUTTI
5’46  Superbe contraste rythmique entre les doubles croches de la basse et les valeurs martelées avec accent sur les temps faibles des autres instruments. Comme souvent chez Mozart cela se résout par une belle arabesque qui semble nous ramener au ton principal
6’03 Surprise. Même motif qu’en 2’10 mais à la place de la marche d’harmonie de belles modulations qui préparent le SOLO
Nouveau thème plaintif  en mineur de violon
TUTTI
Modulation comme à 6’03 mais en majeur, qui préparent le solo…. d’alto (on s’en serait douté)
SOLO
6’45 Finalement l’alto a été contaminé par la tristesse du violon. S’ensuit un dialogue alto/violon avec des marches d’harmonies à la Vivaldi. Le motif mélodique se raccourcit de plus en plus et les instruments à vent commencent à se manifester jusqu’à un nouveau motif en arabesque à 7’39 ponctué par des interventions champêtres des instruments à vent.
TUTTI
On arrive à une phase de récapitulation de ce premier mouvement
8’05 Reprise du tout début de la symphonie concertante qui enchaîne directement sur… le SOLO du début (oui celui à 3′). Alternance de TUTTI identique au thème du début et de SOLOS.
9’04 Là on se demande ce que Mozart va bien pouvoir nous inventer… et nous découvrons un nouveau beau thème en mineur puis un thème en notes répétées sur lequel les solistes broderont ou qui sera repris par le tutti
10’08 Retour du thème bondissant de 4’40 énoncé cette fois par l’alto puis par le violon, accompagnée par une mélodie ascendante des cors
10’25 Superposition inattendue des croches descendantes du tout début avec le premier thème des violons et hautbois à 1’10. Puis on entend sous une forme condensée les procédés utilisés précédemment pour faire dialoguer le violon et l’alto
TUTTI
On retrouve le tutti de 5’46 qui s’achève sur un point d’orgue et prépare la Cadence. Dans un concerto la cadence est la partie finale d’un mouvement, qui permet à l’exécutant de faire preuve de sa virtuosité. Souvent improvisée du temps de Mozart elle est ici entièrement écrite de sa main.

11’54 Cadence.
SOLO
On n’entend que les solistes. Leur duo s’achève par un surprenant adagio qui amène le
TUTTI identique à 2’32 puis thème descendant comme à 2’40 mais au lieu d’amener vers le 1er solo comme à 3′ , on a une cadence (ici au sens d’enchaînements d’accords conclusifs) bien propre qui conclue sur le ton de mib majeur.

Cet allegro se caractérise par une grande variété thématique mais donne une sentiment d’unité grâce à la parenté des thème et à l’habile réutilisation de ceux -ci dans la deuxième partie.

2.Andante

14′ L’andante a 3 bémols à la clé mais est écrit  ut mineur (relatif  mineur de mib majeur) avec un beau thème  presque romantique énoncé d’abord au tutti. Il est repris de manière plus libre par les soliste comme s’il était improvisé. On notera la pauvreté volontaire de l’accompagnement orchestral et l’influence de l’opéra sur les œuvres instrumentales de la période classique.

16’35 beau TUTTI avec une marche d’harmonie descendante très simple et triste, quasi romantique; marche  dont le canevas est repris dans une version très ornementée par le SOLO qui suit à 16’56

17’19 le cor sonne pour annoncer un passage en canon, qu’on attendait un peu depuis le début puisque dans le mouvement précédent les mélodies jouées par les solistes ne se recouvraient pas complètement comme dans un canon.  On entend ensuite une grande arabesque suivie d’une trille, ce qui n’est pas sans évoquer la célèbre sonate K.545

17’45 TUTTI qui reprend des éléments déjà entendus

18’10 très bel enchaînement d’accord qui réintroduit le ton de mib majeur souligné par les hautbois, comme une éclaircie

20’40 Les solistes  puis toutes les cordes jouent des triolets (3 notes par temps)

21’20 pédale ‘note prolongée) au cors sur 6 mesures

21’59 Tutti avec une impression de flottement due aux syncopes des violons dont les notes sont décalées d’un demi temps

22’30 La cadence commence par un canon des deux solistes sur le thème du début de l’andante. Le sublime tutti final est très beau et instable harmoniquement jusqu’à ce que la pédale aux hautbois vienne réaffirmer la tonalité d’ut mineur.

3. Presto

24’50

Cette habitude qu’ont prise les compositeurs depuis l’époque baroque d’écrire leurs concertos en 3 mouvements est assez pénible. Mozart atteint souvent au sublime dans ses mouvements lents, que les conventions de l’époque font invariablement suivre d’un mouvement rapide d’humeur joyeuse histoire de redescendre sur terre. Assez invariablement les 3ème mouvement sont plus convenus et moins inspirés que les deux précédents. Par mesure de rétorsion ( et aussi par lassitude ) nous ne commenterons pas ce mouvement.

A la recherche de la meilleure version

Comme pour les symphonies de Mozart le critère principal est la lisibilité. La symphonie concertante est écrite pour 10 instrumentistes. Il faut pouvoir entendre toutes les lignes mélodiques et notamment les cors qui jouent un rôle dramatique essentiel.

Avant de donner le nom de la version choisie il faut quand même citer celles de Perlman/Zuckerman et Dumay/Hagen qui sont des merveilles de musicalité indépendamment des critères que nous avons choisis. Celle de Fischer et Nikolic est assez enthousiasmante et s’approche de l’équilibre instrumental que nous recherchons.

Version choisie

Mozart_symphonie_concertante_ZehetmairAlbum: W.A. Mozart : Violin Concertos 1-5 – Sinfonia Concertante, K.364 | Interprètes: Orchestra of the Eighteenth Century, Frans Brüggen (Cdirection), Ruth Killius (alto), Thomas Zehetmair (violon) | Editeur: Glossa
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La meilleure version pour découvrir la symphonie concertante est, à notre avis, celle de l’altiste Ruth Killius et du violoniste Thomas Zehetmair, un salzbourgeois formé au Mozarteum. Ils sont accompagnés par l’orchestre du 18e siècle dirigé par Franz Brüggen un spécialiste de la musique baroque. Le tempo pourrait parfois être un peu plus vif, mais on ne ressent pas vraiment le besoin d’écouter une autre version après celle-ci. L’album comprend tous les concertos pour violon, ce qui explique son prix.

Cet enregistrement est recensé dans la petite discothèque classique (3)
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5 réflexions sur « Mozart – Symphonie concertante K.364 »

  1. j’aime bien votre article du point de vue pédagogique et de connaissance générale . bien écrit détermine bien le sujet (même si mozarrt ne me prend pas totalement ) Mais au moins la ,on se croirait presqu’intelligent merci
    je ne sais pas utiliser les balises HTML

    1. Merci beaucoup ! c’est difficile d’essayer d’être à la hauteur du sujet et en phase avec chaque morceau. Mozart ne donne pas toujours le meilleur de lui même mais il me semble que c’était le cas pour cette symphonie concertante. Pour les balises html, cela permet d’ajouter entre autre du gras ou des italiques : <strong> gras</strong> et <em> italique</em> donne gras et italique

  2. J’arrive un an après la publication de cet article, mais il se trouve que je suis justement en train d’étudier cette partition (pour alto).

    Alors tout d’abord bravo pour cette décomposition très complète de cette Symphonie de Mozart !! C’est une des plus complète que j’ai pu lire sur le net.

    Ensuite la petite touche d’histoire au début manque souvent dans certains cours de musique, puisque je ne savais même pas que l’alto – à la base – était accordé un demi ton plus haut.

    Encore bravo pour cet article, qui a demandé j’en suis sûr pas mal de temps d’écriture.

    1. Merci beaucoup pour votre commentaire. J’espère ne pas avoir écris de bêtise.Pas sûr d’avoir à nouveau le courage et l’inspiration nécessaires à la rédaction d’ un article aussi long. Bonne chance pour votre site !

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